12 décembre 2020
Le Québec consolide son statut de deuxième producteur mondial de la canneberge
Par André Dubuc, La Presse
On ne manquera pas d’atocas à Noël cette année. La province a confirmé son statut de deuxième producteur mondial de canneberges, selon une nouvelle étude, derrière le Wisconsin. L'industrie québécoise se démarque particulièrement dans la production bio et la transformation. Tour d'horizon.
Au Québec, les 81 fermes qui cultivent la canneberge ont produit 230,7 millions de livres du petit fruit écarlate en 2020 (environ 105 millions de kilos), en baisse de 10 % par rapport à 2019. Les recettes s’élèvent à 83 millions US. Au taux de change actuel (1 USD = 1,28 CAN), la cagnotte atteint 106 millions. La récolte record en volume remonte à 2016. En comparaison, le Wisconsin produit le double de la récolte québécoise. Le Massachusetts, État où se trouve le siège social du leader mondial, la coopérative Ocean Spray, qui contrôle 65 % de la production mondiale, se dirigeait vers une récolte de 180 à 190 millions de livres cette année, selon Brian Wick, directeur principal de l'Association des producteurs de canneberges de Cape Cod.
Leader mondial du bio
Sur les 230 millions de livres produites dans la province, 65,4 millions de livres (30 millions de kilos) sont issues de la culture biologique, ce qui confère au Québec le premier rang mondial à ce chapitre.
« Par rapport à ses concurrents américains, le Québec dispose d’avantages comparatifs comme le froid, lequel contrôle naturellement les maladies et les insectes nuisibles, ce qui simplifie la culture en régie biologique », explique au téléphone Vincent Godin, 33 ans, président de l’Association des producteurs de canneberges du Québec (APCQ). Il préside aussi PAMPEV, producteur ayant en culture 90 bassins de canneberges, en plus de détenir le transformateur Emblème Canneberge depuis 2016.
La canneberge se vend fraîche, congelée ou transformée en jus, en sauce et en produits séchés. Ses propriétés antioxydantes en font un petit fruit recherché. La consommation régulière de jus aide à prévenir et à réduire les infections urinaires.
La filière, qui se concentre à 85 % dans le Centre-du-Québec, a publié la semaine dernière une mise à jour de ses retombées économiques.
Depuis 2014, la canneberge (recettes de 86 millions en 2018) est la production fruitière la plus importante au Québec, loin devant les fraises (66 millions), les pommes (58 millions) et les bleuets (43 millions).
C’est un juste retour des choses, puisque la canneberge poussait à l’état sauvage avant la colonisation et était prisée des autochtones. Le plant, qui vit une centaine d’années, pousse dans les sols sablonneux, ce qui permet de valoriser des sols jugés moins propices à l’agriculture.
Transformation locale
Il ressort de l’étude, réalisée par Deloitte et E & B Data, que la canneberge se démarque par une croissance continue des superficies en culture depuis 10 ans et par l’essor de la culture biologique (hausse annuelle moyenne des superficies cultivées de 31 % depuis 5 ans).
La canneberge bio (0,50 $ US la livre en moyenne en 2020) se vend 67 % plus cher que la traditionnelle (0,30 $ US), ce qui explique la popularité de la première chez les producteurs.
« Ce qui est impressionnant, c’est le niveau d’intégration verticale de l’industrie », a insisté Jean Matuszewski, président d’E & B Date, l’un des coauteurs de l’étude avec Louis J. Duhamel, conseiller stratégique chez Deloitte.
Environ 72 % de la production est transformée au Québec, essentiellement dans le Centre-du-Québec et en particulier à Plessisville, où se trouvent deux des cinq usines de transformation.
« Vous savez que c’est un enjeu au Québec depuis toujours ? On a la matière première, encore faut-il être capables de la transformer localement et de lui donner de la valeur. En tant que filière, c’est ce que vous avez réussi à faire », a dit M. Matuszewski aux participants venus écouter la présentation qui s’est déroulée virtuellement le 1er décembre.
À ce propos, Fruit d’Or, leader mondial de la transformation de canneberges biologiques avec 420 travailleurs, a annoncé en septembre un investissement de 17,5 millions à son usine de Plessisville. Celui-ci comprend un agrandissement de 25 000 pi2 et l’ajout de deux nouvelles chaînes de production, dont une chaîne de canneberges séchées (entières ou sans sucre ajouté) ainsi qu’une chaîne de tri automatisé en continu.
Le Québec et la canneberge
- 2e producteur mondial (26 % de la production)
- 1er producteur mondial de canneberges biologiques
- 81 fermes
- Quatre transformateurs dont la contribution au PIB est estimée à 149 millions
- 72 % de la production transformée localement
- 2168 emplois directs, indirects et induits (excluant les travailleurs étrangers)
- 36 millions de revenus pour les gouvernements
Source : Association des producteurs de canneberges du Québec
La canneberge, une histoire de familles
L’essor de la filiale cannebergière au Québec, c’est d’abord et avant tout une histoire de familles. Premier producteur : famille Larocque. Premier transformateur : famille Bieler. Premier producteur biologique d’envergure : famille Le Moine. Survol en cinq dates.
1939
La famille Larocque aménage ses premières cannebergières à Lemieux.
1984
Le Suisse d’origine Marc Bieler se lance dans la production de canneberges à Saint-Louis-de-Blandford. Il ouvrira quelques années plus tard la première usine de transformation à Manseau. L’usine sera rachetée en 2018 par le géant Ocean Spray.
1994
Création de l’Association des producteurs de canneberges du Québec.
2001
Fondation de la société Fruit d’Or de la famille de Martin Le Moine à Notre-Dame-de-Lourdes. La famille Le Moine est un chef de file de la culture de la canneberge biologique.
2016
La production québécoise surpasse pour la première fois celle du Massachusetts, berceau de l’industrie.
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